"La Victorine retrouvera-t-elle un jour le haut
de l'affiche ?",
Nice-Matin,
Nice-Matin,
16 mai 2009.
On ne tourne plus beaucoup sur le site de La Victorine, aujourd'hui exploitée par les Studios Riviera. Ce qui inquiète les prestataires […].
"Studios Riviera"
A deux pas de la voie rapide, passé le grand portail blanc, plus un chat, plus un bruit. Juste un silence assourdissant. Alors que Cannes parade ces jours-ci dans le costume de capitale du cinéma, la Victorine fête ses 90 ans bien seule. Et pour tromper la morosité économique, le site mythique de Nice-ouest doit se repasser le film de ses années de gloire. Ses derniers coups d'éclat ? L'émission de télé-réalité "Nice People" en 2003, la grosse machine Mister Bean en 2006, le film Le Siffleur et la série Cinq soeurs l'an dernier... Pourtant, les studios Riviera ont perdu la passion du 7e art. Et sur la liste ronflante de films qui y ont fait escale, peu y ont effectivement été tournés.
En panne d'essence
« Il y aura encore deux ou trois coups d'éclats, mais ça va s'assombrir », prédit Yves Moreaux, de l'atelier « Le Trompe l'œil ». Le producteur Michel Cinque renchérit : « On est devenu une vache à lait, et la Victorine a perdu de son essence. Ils font de l'immobilier d'entreprise. En exagérant un peu, un jour, il va y avoir un McDo ici ! » « Ce n'est pas une zone industrielle. On ne loue que si ça a un sens », réplique Dana [Davidson] Théveneau, directrice de développement des studios Riviera. Depuis dix ans, la Ville a confié la gestion du site à cette filiale du groupe Euromedia dirigé par Jean-Pierre Barry, grand manitou de la production en France, dont le géant Bolloré est actionnaire minoritaire.
La vie sans "5 soeurs"
Euromedia est titulaire d'un bail emphytéotique courant jusqu'en 2018. Avant de songer à attirer des tournages, il a d'abord fallu retaper un site à l'abandon, puis subir les travaux sur la voie rapide, rappelle Dana Théveneau. « OK, ça ne tourne pas comme avant. La Victorine a connu des hauts et des bas, mais elle a résisté à toutes les évolutions technologiques. Aujourd'hui, on est une base technique, un pôle audiovisuel. On est trop petits pour être un Cinecittà et accueillir des blockbusters, mais on est parfait pour les scènes en cas de pluie ou les séries TV. » D'où l'espoir né avec Cinq soeurs. Las, faute d'audience, France 2 a arrêté les frais de ce Plus belle la vie sauce niçoise, qui a fait travailler 120 techniciens l'an dernier. Un flop au goût amer pour les locataires des studios. Et ce, d'autant plus qu'ils s'accordent sur un point : « Il y a les locaux, le matériel, bref tout le potentiel pour des tournages, selon Yves Moreaux. Tout, sauf la volonté de développer le site... »
Effet french Riviera
Chez Transpalux, spécialiste de l'éclairage, Michel Bovis se montre plus optimiste. Son agence est celle qui génère le plus gros chiffre d'affaires du groupe. Le festival de Cannes, « l'effet « french Riviera » à savoir le climat, la situation géographique et touristique... » Autant de motifs d'espérer, crise ou pas. Mais lui aussi en convient : le site manque d'activité. « On est en concurrence avec d'autres régions et même avec Marseille », plaide Dana Théveneau. Et l'économie du cinéma est cyclique et fragile. D'où une gestion prudente. » Prudente à l'excès ? Si Bernard Mazauric est parti en 2004 après trente ans de production exécutive, c'est parce qu'il a estimé « qu'être à la Victorine n'était pas un avantage. Pourtant, il serait facile de la relancer. Pour un film à 10 M €, la différence de coût entre Nice et à Sophia est d'environ 700 000 €. Avec les subventions des collectivités et les crédits d'impôts, l'écart n'est au final pas énorme... » Encore faut-il que le site... reste dédié au cinéma. Aux studios Riviera, Dana Théveneau reconnaît subir une intense « pression foncière ». La rumeur court même que la Ville aimerait récupérer le site pour y bâtir. Ce que le député-maire Christian Estrosi dément formellement.
Laure Bruyas
Christophe Cirone
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